Système d’indicateurs spatialisés pour la gouvernance territoriale : application à l’occupation des sols en zone périurbaine languedocienne

MAUD BALESTRAT

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En France, les phénomènes de périurbanisation imposent une réflexion sur les conditions d’un développement urbain durable. En zone languedocienne, dans un contexte de forte attractivité démographique, l’urbanisation rapide et mal maîtrisée se fait aux dépens des terres agricoles les plus productives de la région, sur la plaine littorale. L’évolution des demandes sociales et les enjeux autour de la sécurité alimentaire mondiale interrogent sur la façon dont les politiques de planification périurbaine intègrent le foncier agricole. Pour objectiver les débats et appuyer les décisions, les instances agricoles expriment des besoins urgents en indicateurs spatialisés.

La question qui a guidé mes recherches est la suivante : comment produire un système d’indicateurs spatialisés et spatiaux qui réponde aux enjeux de gestion des espaces périurbains et participe à une plus grande prise en compte des espaces agricoles dans les politiques de planification ? Pour traiter de cette problématique j’ai focalisé mes travaux sur une étude commanditée par la Direction Régionale de l’Agriculture et de la Forêt du Languedoc-Roussillon, destinée à l’analyse et au suivi de l’artificialisation des sols à l’échelle régionale. La demande traduit les dynamiques actuelles en faveur d’une plus grande implication des instances agricoles et d’une reconsidération de la place des espaces agricoles dans les politiques de planification urbaine.

L’hypothèse générale qui sous-tend mes recherches peut être formulée de la façon suivante : pour construire un système d’indicateurs adapté à l’accompagnement des dispositifs de gestion des espaces périurbains il faut mettre en place une ingénierie d’aide à la décision. Cette hypothèse générale détermine deux sous-hypothèses portant sur la nature de l’ingénierie qui doit s’appuyer sur :
• une approche modélisatrice pour développer une approche systémique de la problématique périurbaine et envisager l’intégration des indicateurs dans un modèle d’analyse ;
• une démarche participative itérative de co-construction et de co-évaluation du système d’indicateurs.

Modélisation systémique et concertation itérative ont ainsi été retenues comme les approches adaptées pour guider le processus de constitution et de sélection des indicateurs. La figure 1 rappelle les grandes étapes de la démarche mise en œuvre.

La mise en place d’une démarche de concertation a d’abord conduit à la modélisation des dynamiques de périurbanisation à l’œuvre en Languedoc-Roussillon. Le modèle, basé sur une adaptation du référentiel DPSIR (cf. figure 2), a ensuite été précisé avec les acteurs institutionnels pour répondre à la problématique posée par la DRAAF LR, en matière de gestion des espaces agricoles périurbains. Ce cheminement a permis de construire une représentation intégrée et partagée du système territorial languedocien, utile pour guider le processus de sélection des indicateurs et leur organisation dans un système d’aide à la décision.

En parallèle, les interactions entre chercheurs et acteurs ont permis de préciser les besoins en indicateurs pour suivre les dynamiques de consommation du potentiel agronomique des sols par les surfaces artificialisées. Les analyses issues des travaux de modélisation systémique et de concertation itérative, ont mis en évidence le manque de connaissances disponibles, voire de données, pour quantifier et qualifier l’évolution du capital foncier. Afin d’assurer l’opérationnalité du système d’indicateurs final, une méthode de suivi des espaces artificialisés dans le temps ainsi qu’une méthode de qualification du potentiel agronomique des sols ont été définies. Des taches artificialisées et un Indice de Qualité des Sols à l’échelle respectivement des départements littoraux et de la totalité du territoire languedocien ont ainsi été produits.

La mise en œuvre de la démarche de co-construction a abouti à la production d’un système composé de 141 indicateurs spatialisés et spatiaux liant l’évolution du capital foncier à celle de la tache artificialisée languedocienne et mis à la disposition des acteurs par l’intermédiaire d’une interface de consultation en ligne. Les quelques indicateurs spatiaux proposés utilisent des critères de distance pour analyser, par exemple, les phénomènes de polarisation des centres-urbains et de création de nouvelles centralités en périphérie des villes. Le système d’indicateurs produit permet aux acteurs des instances agricoles d’objectiver et de légitimer leur discours dans les démarches de planification périurbaine. Les résultats ont pu être discutés tout au long du processus de co-construction, afin d’évaluer les apports et limites de la démarche proposée et d’envisager des pistes de recherche dans la perspective de poursuivre ces travaux.

Mes recherches ouvrent ainsi des pistes dans plusieurs domaines. Dans le cadre des démarches de production d’indicateurs, elles s’intéressent à l’emploi de la modélisation, en particulier du modèle DPSIR, comme outil de traduction des processus de périurbanisation et comme support de concertation et de négociation. Ces recherches soulèvent également des enjeux de légitimité, d’opérationnalité et d’interprétation des indicateurs qui impliquent la nécessité de proposer des méthodes d’apprentissage et d’accompagnement des acteurs. Elles questionnent enfin les modalités d’emploi des techniques d’analyse et de modélisation spatiale pour la construction d’indicateurs spatiaux novateurs.


Lien électronique

http://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00655401

Discipline

Géographie

Directeur

Jean-Pilippe Tonneau

Université

Université Paul Valéry Montpellier III

Membres du jury de thèse, soutenue le 29 juin 2011

Mr Eduardo CHIA – Directeur de recherche, INRA SupAgro Montpellier – Rapporteur
Mme Christiane WEBER – Directrice de Recherche, Université de Strasbourg – Rapporteur
Mr Emmanuel ROUX – Maître de Conférences, Université J.Fourier Grenoble – Examinateur
Mr Jean-Philippe TONNEAU – Directeur de Recherche, CIRAD Montpellier – Directeur
Mr Jean-Pierre CHÉRY – Maître de Conférences, AgroParisTech Montpellier – Co-encadrant

Situation professionnelle actuelle

Post-doctorat de géographie financé par la fondation STAE (Coopération Scientifique Sciences et Technologies pour l’Aéronautique et l’Espace) accueilli au laboratoire GET (Géoscience Environnement Toulouse) UMR du CNRS en Midi-Pyrénées pour le projet MAELIA (Multi-Agent for Environmental Norms Impact Assessment)

Contact de l’auteur

maudbalestrat@yahoo.fr